BILAN ET LA MISE EN ŒUVRE DE LA LOI DU 11 FEVRIER 2005
SEPTEMBRE OCTOBRE 2007 - RÉADAPTATION N° 543
Xavier Bertrand et Valérie Létard ont, à l'occasion de la séance plénière du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) du 26 juin dernier, confié à Patrick Gohet, Délégué Interministériel aux Personnes Handicapées, un rapport d'évaluation afin de dresser un état des lieux précis et concrets de la mise en place de la loi, et du fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Ce rapport, dont l'élaboration a fait l'objet d'une large concertation avec, notamment, des représentants des départements, les associations, mais aussi avec la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie (CNSA), a été remis aux ministres par Patrick Gohet. On en trouvera ci-dessous la synthèse. Il rappelle les principes généraux de la politique du handicap et la nécessité de les mettre au service d'un vrai projet de vie.
Le rapport de Patrick Gohet - Délégué interministériel aux personnes handicapées
30 ans après l'adoption des fameuses lois du 30 juin 1975, il était indispensable de reformer en profondeur la politique française du handicap. Le handicap résultant de l'interaction entre les incapacités d'une personne et l'inadaptation de son environnement, la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées apporte deux réponses : la compensation et l'accessibilité. Elle intègre tous les types de handicap à tous les âges de la vie. Le bilan et la mise en perspective, réalisés par le Délégué Interministériel aux Personnes Handicapées, résultent d'une large consultation avec l'ensemble des acteurs politiques, associatifs, administratifs, économiques...
En matière de scolarisation et en dépit des progrès considérables réalisés (création de classes intégrées, d'UPI..., mise en place d'AVS...), il importe d'informer directement les familles sur leurs droits , la diversité des solutions et les procédures à suivre, d'accélérer et d'approfondir la formation des enseignants, de professionnaliser les auxiliaires de vie scolaire, de réduire le nombre d'élèves handicapés suivis par les enseignants référents, d'intégrer l'éducation adaptée dans le mise en oeuvre de la réforme...
La transcription des ouvrages scolaires pour les élèves aveugles et malvoyants, l'intégration plus résolue de la pratique du sport... sont également des mesures à prendre. L'accueil et l'accompagnement des étudiants handicapés ont beaucoup progressé. Pour autant, les relations entre les universités et les grandes écoles d'une part et les associations prestataires de services d'autre part, appellent des mesures d'harmonisation nationale, en cours de préparation par le comité de pilotage animé par la Délégation interministérielle.
Le droit opposable à la scolarisation voulu par le Président de la République est accueilli comme l'expression de sa volonté d'assurer aux jeunes handicapés l'effectivité de leurs droits. Cette perspective nourrit néanmoins de nombreuses interrogations auxquelles il convient de répondre rapidement.
En ce qui concerne l'emploi, les quotas prévus par la loi sont, en dépit d'incontestables avancées, loin d'être atteints par les secteurs publics et privés. Une forte sensibilisation s'impose.
Un certain nombre de mesures sont de nature à y contribuer : la mise en place effective du FIPHFP, l'élargissement du domaine d'intervention de l'AGEFIPH, la validation des acquis de l'expérience en ESAT, l'assouplissement du contingentement de 80%de travailleurs handicapés qui permet aux entreprises adaptées d'accéder à l'aide aux postes, le regroupement des CAP Emplois dans un réseau coordonné et identifié, une mobilisation des régions autour de la formation professionnelle...
Avec la compensation des incapacités individuelles, l'accessibilité est un élément phare de la politique du handicap. C'est elle qui la rend visible aux yeux de tout citoyen. L'impatience des personnes handicapées est grande. Les inquiétudes des collectivités territoriales, des entreprises, des administrations... ne le sont pas moins. Une relance s'impose. Les commissions communales d'accessibilité doivent être installées dans toutes les communes de plus de 5000 habitants avant la fin de l'année. L'accessibilité des lieux de formation et de travail doit être privilégiée. Les travaux relatifs à l'accessibilité de la communication, pour les personnes sourdes et aveugles notamment, doivent être accélérées. Deux initiatives semblent s'imposer : s'assurer que les experts nécessaires à la réalisation des diagnostics sont en nombre et en qualité suffisants, réduire les délais de réalisation de ces diagnostics en retenant le 31 décembre 2008 comme date butoir, construire un référentiel de formation comportant un tronc commun et intégrer les nouvelles technologies dans cette politique d'accessibilité.
Pour les personnes handicapées, les familles, connaître ses droits, les différents interlocuteurs à contacter, les procédures à suivre..., constituent un véritable parcours du combattant. C'est pourquoi ont été créées les Maisons Départementales des Personnes Handicapées. À l'injustice provoquée par les accidents de la vie, les personnes handicapées n'acceptent pas qu'y soient ajoutées des inégalités dues à l'organisation sociale. C'est pourquoi a été instituée la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie, principal outil de l'égalité de traitement sur l'ensemble du territoire national.
La mise en place des MDPH est une véritable révolution culturelle et institutionnelle. Inévitablement, en dépit des efforts des uns et des autres, et notamment des départements, elle est progressive. Les attentes insatisfaites des personnes handicapées et des familles sont fortes. Un coup d'accélérateur est indispensable.
Même si elle est parfois considérée comme lourde dans son fonctionnement, la formule du groupement d'intérêt public permet la réunion de tous les acteurs, et constitue la forme juridique soutenue par les associations.
En matière de moyens, la première mesure à prendre porte sur la stabilisation des personnels, en particulier de ceux mis à la disposition par l'État. Il en va de même pour le reste des moyens de fonctionnement. Les fonds départementaux de compensation sont le plus souvent mis en place mais il convient d'appeler les différents partenaires des anciens sites pour la vie autonome à ne pas se désengager.
En ce concerne la prochaine génération de PRIAC, la consultation des associations et la participation des départements sont à prévoir.
Le fonctionnement transparent et consensuel de la CNSA fait l'objet d'une appréciation favorable unanime. La fonction d'accueil, d'écoute et de conseil des MDPH reste embryonnaire. Elle a besoin d'être confiée à d'authentiques professionnels ce qui appelle une formation rapide et complète.
La mise en oeuvre du projet de vie est toute relative. La notion doit être expliquée car il s'agit de faire en sorte que le devenir de la personne handicapée ne résulte pas uniquement d'une évaluation effectuée par des experts mais également de l'expression des aspirations et des besoins par la personne même. Personnalisé, global et évolutif, le plan de compensation reste encore parcellaire. Si aujourd'hui, il porte essentiellement sur le volet prestation, il importe qu'il soit rapidement élargi à tout ce qui doit le constituer : scolarisation, emploi, participation à la vie sociale... L'ancien dispositif CDES/COTOREP a souvent légué d'importants retards qui expliquent souvent le non respect du délai de 4 mois. Il faut simplifier les dossiers à remplir ainsi que les outils d'évaluation qui doivent, avant tout, prendre la forme de guides plutôt que de grilles. Les équipes pluridisciplinaires sont à compléter. Quant aux commissions des droits et de l'autonomie, elles sont encore largement engorgées. Des mesures sont à prendre pour accroître les attributions des formations restreintes, développer la participation des suppléants, former les différentes catégories de membres. Très vite, des dispositions sont à prendre pour que les personnes handicapées et les familles puissent être entendues, en tout cas celles qui le demandent. Quant à la médiation et à la conciliation, une campagne nationale de recrutement pourrait être conduite par l'État, la CNSA et l'ADF. Les échanges et les travaux qui ont précédé l'élaboration du rapport ont mis en exergue les demandes suivantes :
_ la programmation, dès 2008, des créations de places spécialisées nécessaires, tant pour les jeunes que les adultes (autistes, polyhandicapés, jeunes handicapés mentaux...) ;
_ la reprise et l'approfondissement des relations avec la Belgique autour de la question des personnes handicapées qui y sont accueillies ;
_ la relance des plans grande dépendance et handicaps rares ;
_ les suites des 3 rapports élaborés par le CNCPH à son initiative (ressources, barémisation des accidentés du travail et grande dépendance) ;
_ lamise en place de la réforme de la protection juridique;
_ la convergence handicap et perte d'autonomie, et la construction d'un cinquième risque.
Quelques grandes orientations :
_ une pause législative et réglementaire (néanmoins, en application de la loi du 11 février 2005, 11 décrets et 23 arrêtés restent à prendre) ;
_ la mise en place d'une cellule d'accompagnement et de suivi de la réforme de la politique du handicap dupliquée au niveau régional ;
_ la création d'une commission de simplification et de mise en cohérence de dispositifs de concertation et de planification en matière de handicap et de perte d'autonomie ;
_ l'installation d'une veille législative et réglementaire ;
_ point annuel sur les aménagements juridiques et techniques à apporter au dispositif législatif et réglementaire après la remise aux Ministres du rapport annuel du CNCPH ;
_ création d'un label "Handicap et Perte d'Autonomie" pour faire de l'accessibilité l'un des critères d'excellence en matière de construction, de transports, de pédagogie... ;
_ création d'un jury national décernant chaque année, des prix HPA sur l'accessibilité, l'emploi, la scolarisation afin de récompenser les meilleurs et de faire connaître les bonnes pratiques ; ce jury pourrait être placé sous le haut patronage du Président de la République qui remettrait les prix aux lauréats le 11 février de chaque année devenu journée nationale du handicap et de la perte d'autonomie ;
_ organisation de la première conférence nationale du handicap en mai 2008, dans la foulée des élections municipales et cantonales. _
Patrick Gohet, Délégué interministériel aux personnes handicapées
11 place des Cinq Martyrs du Lycée Buffon - 75014 Paris - Tél. : 01 40 56 68 48 - Fax : 01 40 56 68 20 - E-mail : patrick.gohet@sante.gouv.fr
Adresse postale : 14 avenue Duquesne 75350 Paris 07 SP - www.handicap.gouv.fr
Xavier Bertrand et Valérie Létard
secretariat.communication@cab.travail.gouv.fr - www.travail.gouv.fr
Xavier Bertrand Valérie Létard
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