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Alain Goric'h (Journaliste) Encore trop de brèches à ouvrir ! ( APAJH La revue n°94 Juin 2007)


Mireille a connu la douleur et la lassitude. Elle a vécu l'horreur, la solitude et le découragement. Mais la révolte et l'acharnement ont pris le dessus. Se battre pour son fils et arracher des petites victoires sont les balises qui lui ont permis de rester vaillante jusqu'à aujourd'hui.

Témoignage

Encore trop de brèches à ouvrir !

 

Mireille a connu la douleur et la lassitude. Elle a vécu l'horreur, la solitude et le découragement. Mais la révolte et l'acharnement ont pris le dessus. Se battre pour son fils et arracher des petites victoires sont les balises qui lui ont permis de rester vaillante jusqu'à aujourd'hui. Cinq années séparent la date fatidique de l'accident de voiture d'où ses enfants et elle-même sont sortis grièvement blessés. Jean-Charles, l'un de ses jumeaux de 11 ans, était le plus atteint : deux mois dans le comas, paraplégique et aphone. Aussi incroyable que cela puisse paraître, Jean-Charles se prépare aujourd'hui à entrer en classe de seconde générale, cinq ans plus tard. Et Mireille est reconnue comme travailleuse handicapée.

18 mois après l'accident, son fils retrouve le chemin du collège. Difficile d'imaginer les obstacles qui ont émaillé leur parcours. « Je me suis battue comme une lionne » confie Mireille, tout en reconnaissant que le sentiment d'abandon l'a souvent  envahie: « J'ai vu et je vois encore combien de parents qui, faute d'encouragements, d'aides et de conseils judicieux, ne trouvent pas la force pour être combatifs et arracher les réponses à leurs questions ? ». Ses ressources, elle dit les avoir puisées plus auprès des professionnels de la santé que ceux de l'éducation. En hôpitaux et SESSAD, elle et son fils se sont sentis « accueillis et pris en charge intégralement ». Par contre, elle a vécu l'accueil au collège comme une « admission, une tolérance. Nous devenions dépendants du bon vouloir de l'administration ! ».

Quand Mireille a souhaité que son fils soit préparé à entrer en classe de seconde, elle a été « convoquée » par le principal « qui m'a affirmé que je conduisais Jean-Charles vers l'échec assuré ». Nullement désarçonnée, Marie prend le mors aux dents, se fait élire au bureau du conseil des parents d'élèves et, avec la complicité du médecin, parvient à faire aménager l'emploi du temps scolaire de son fils. Résultat : Jean-Charles retrouve progressivement le niveau scolaire de son frère jumeau et sera admis en seconde générale dans un lycée ordinaire, pour la prochaine rentrée. « Rien de miraculeux, précise la maman, c'est le fruit d'un combat personnel de chaque jour, et du soutien des professionnels soignant et paramédical. C'est absurde d'être contrainte de se battre contre le corps enseignant, alors que je ne souhaitais que collaborer » regrette-t-elle. Malgré l'annonce d'éclaircies, au terme de cinq années éprouvantes, la rancœur est toujours tenace : « Nous sommes toujours dans l'obligation de justifier notre existence, et contraints d'arracher les réponses à nos questions ! Nous ne réclamons pas l'intégration, mais bien d'être reconnus comme membres à part entière de la société ». Par contre Mireille ne tarit pas d'éloge sur le personnel médical et paramédical : « Ils ont ouvert des brèches et en ouvrent encore pour favoriser la scolarisation des enfants ». Loin de relâcher ses efforts, elle redouble d'énergie pour ouvrir au SESSAD APAJH de Créteil (94) une formule d'accueil et de conseils en direction des parents « qui n'ont pas eu la chance comme moi de rencontrer quelqu'un qui peut comprendre leur désarroi, qui peut répondre aux questions qu'ils ne parviennent pas à poser ».

Alain Goric'h

 

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