La loi du 4 mars 2002 (1) a transformé des obligations déontologiques ou professionnelles faites aux médecins en droits des patients. En donnant à ces derniers de nouvelles prérogatives, elle les rend acteurs du processus de soins et favorise une relation soignant-soigné plus équilibrée. Le point sur quelques dispositions phares.
• Droit d'accès direct à son dossier médical
Mesure phare de la loi du 4 mars (2) : permettre à toute personne d'accéder directement, sur demande, aux informations contenues dans son dossier médical. Elle peut aussi le faire par l'intermédiaire d'un praticien qu'elle désigne. Elle a le droit de consulter gratuitement sur place les documents (comptes rendus, résultats d'examens, feuilles de surveillance…) ou de s'en faire remettre ou envoyer une copie, mais dans ce cas, les frais d'envoi et de reproduction peuvent lui être facturés par l'hôpital. Pour les données de santé datant de moins de cinq ans, la communication doit être faite dans un délai de huit jours, sauf exception. Pour celles de plus de cinq ans, ce délai passe à deux mois.
• Droit d'être informé sur son état de santé
Le patient a le droit d'être informé sur son état de santé, sur les actes médicaux envisagés avec les avantages et les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent, sur les possibilités thérapeutiques alternatives et sur les coûts du ou des traitement(s) proposé(s). La loi du 4 mars réaffirme et précise ce droit (3). Cette information se déroule lors d'un entretien individuel auquel peut toutefois participer la personne de confiance qu'il aura, le cas échéant, désignée (voir plus bas). Le patient doit également être mis au courant d'un risque sanitaire nouveau lié à un acte de prévention, de diagnostic ou de soin, identifié après sa sortie de l'hôpital (sauf impossibilité de le retrouver). Cette obligation d'informer s'impose à tous les professionnels de santé. Elle ne comporte que deux dérogations : l'urgence ou l'impossibilité d'informer et la volonté du patient d'être tenu dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic grave, hors risque infectieux ou génétique de transmission de sa maladie. Ce n'est donc plus le médecin qui décide “en conscience” s'il informe ou non le patient sur certains points, mais c'est à ce dernier de faire connaître son souhait. La loi du 4 mars a également entériné une jurisprudence très importante : en cas de litige entre le patient et le professionnel de santé, c'est à ce dernier de prouver qu'il a bien donné l'information. Ce n'est donc plus à l'usager de prouver qu'il n'a pas été suffisamment bien informé. Ce droit à l'information est d'autant plus important qu'il conditionne l'adhésion et la participation de la personne hospitalisée au processus de soins.
• Droit de participer aux décisions concernant sa santé
Le code de déontologie médicale précise qu'avant tout acte médical, le médecin doit recueillir le consentement libre et éclairé du patient. La loi du 4 mars passe du seul principe de consentement à celui de décision partagée. Elle affirme ainsi : « Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé (4). » Elle renforce sa possibilité de dire non à un acte ou à un traitement médical et réaffirme l'obligation professionnelle de respecter un tel refus. Ce n'est qu'en cas d'urgence vitale que cette obligation sera confrontée à celle d'assistance à personne en danger. La jurisprudence reconnaît alors au médecin le droit d'agir pour la sauvegarde immédiate de la vie, dès lors que les conditions d'information ont été observées.
• Désignation d'une personne de confiance
C'est une nouvelle prérogative pour le patient posée par la loi (5), en lien avec les droits d'être informé et de participer aux décisions concernant sa santé. Toute personne majeure peut ainsi désigner une personne de confiance pour l'assister à l'hôpital. Son rôle ? Accompagner le malade dans ses démarches et ses entretiens pour l'aider à prendre des décisions ou recevoir l'information. Elle peut être également consultée quand l'intéressé(e) est hors d'état d'exprimer sa volonté, en cas de coma par exemple. Sa présence aux entretiens médicaux représente une dérogation au secret professionnel et ne peut être récusée par les personnels de santé sur cette base. Sa désignation se fait par écrit et est révocable à tout moment, même oralement. Elle se fait soit à l'initiative de l'usager, soit sur proposition de l'hôpital qui en a l'obligation.
• Droit au secret des informations
Le patient doit être assuré que les informations le concernant, qu'elles portent sur son état de santé ou sur sa vie privée, ne seront pas divulguées sans son accord. Selon la loi (6), ce secret couvre l'ensemble des informations, venues à la connaissance du professionnel de santé, de tout membre du personnel et de toute autre personne en relation, de par ses activités, avec l'hôpital. Elle réaffirme et précise le secret professionnel dans le champ de la santé en le reformulant sous l'angle du droit de l'usager. C'est lui qui est maître de telles informations et choisit de les communiquer ou non à ses proches. Ce secret s'impose à tout intervenant professionnel du système de santé. Pour lui, il ne s'agit plus seulement d'un devoir mais d'une obligation. En cas de manquement, il peut être sanctionné pénalement pour non respect du secret, mais aussi pour avoir cherché à obtenir des informations auxquelles il n'avait pas de droit d'accès. De plus, plusieurs professionnels de santé ne peuvent partager des informations sur un patient dans le but d'assurer une bonne continuité des soins que si ce dernier en a été dûment averti et ne s'y est pas opposé. Ce point ne concerne pas l'équipe de soins de l'hôpital, au sein de laquelle l'information confiée par l'usager est réputée confiée à tous, sauf précision de sa part. La loi renforce également le droit à la confidentialité pour les mineurs qui peuvent refuser que leur état de santé soit connu de leurs parents.
• Droit à la qualité des soins
La loi pose une nouvelle notion importante : celle de la responsabilité sans faute médicale, à savoir l'aléa thérapeutique, même si le mot ne figure pas dans les textes (7). Elle reconnaît ainsi le droit à réparation suite à un accident médical, si ses conséquences sont particulièrement graves, qu'il y ait eu faute ou non. Elle met en place un dispositif d'indemnisation plus facile, plus rapide et moins coûteux pour le malade. Elle confirme également la jurisprudence en matière d'infections nosocomiales (infections contractées lors d'un séjour à l'hôpital) en affirmant que l'hôpital est responsable des dommages résultant de telles infections, sauf s'il apporte la preuve d'une cause étrangère.
• Droit à la protection des données informatisées
Les nouvelles technologies de l'information prennent une place de plus en plus importante à l'hôpital. Celui-ci est soumis à une obligation renforcée de sécurisation des données informatisées concernant le patient, qu'elles soient d'ordre privé ou médical. Il doit assurer la protection de la confidentialité des informations recueillies, mais également veiller à leur sauvegarde (8).
Valérie Di Chiappari
(1) Loi 2002-303 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. (2) Article L. 1111-7 du CSP. (3) Article L. 1111-2 du Code de Santé publique (CSP). (4) Article L. 1111-4 du CSP. (5) Article L. 1111-6 du CSP. (6) Article L. 1110-4 du CSP. (7) Article L. 1142-1 et suivants du CSP. (8) Article L. 1111-8 du CSP et décret du 4 janvier 2006.
Encadré Une loi pour la fin de vie
La loi du 22 avril 2005* s'inscrit dans la droite ligne de celle du 4 mars 2002, en reconnaissant des droits spécifiques aux malades en fin de vie. Elle stipule que les traitements ne doivent pas être poursuivis par une « obstination déraisonnable ». Il s'agit ainsi d'éviter tout acharnement thérapeutique. Sans légaliser l'euthanasie, elle autorise l'administration de traitements anti-douleur, après information du patient, même s'il en résulte une mort plus rapide. La volonté du patient en phase terminale se trouve également renforcée puisqu'il peut décider de limiter ou d'arrêter tout traitement, en ayant été au préalable informé des conséquences de son choix. S'il est inconscient, cette limitation ou cet arrêt ne peuvent être décidés que par une procédure collégiale et après consultation de la personne de confiance, de la famille ou, à défaut, d'un proche. Cette loi accroît le statut de la personne de confiance car son avis prévaut sur tout autre avis non médical. Enfin, elle met en place un testament de vie. Désormais, tout majeur peut rédiger des directives anticipées, révocables à tout moment, pour le cas où il serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Le médecin doit en tenir compte à condition qu'elles aient été formulées moins de trois ans avant la perte de conscience.
- Loi n° 2005-370 relative aux droits des malades et à la fin de vie. Les décrets d'application de cette loi sont attendus à l'heure où nous imprimons.
Zoom Pour en savoir plus
- Les Droits des patients à l'hôpital, de François Ponchon, Éditions PUF (2002), collection Que sais-je ?
- Droit des malades vers une démocratie sanitaire, ouvrage collectif, Documentation française (2003)
Et aussi : www.moteurline.apf.asso.fr rubrique “Droits des malades”/Loi du 4 mars 2002, avec des fiches analytiques et pratiques qui commentent certaines dispositions de la loi.
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