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Professeur François Clarac - Lésion spinales et cicatrice gliale, comment réparer ? (La lettre de l’IRME, n°41, avril 2013)


Une des premières préoccupations de L'IRME depuis sa création a été l'étude des traumatismes médullaires et des difficiles possibilités de réparation post-lésionnelle après un accident. Devant de tels drames, on sait que le point le plus crucial est le niveau de la lésion ; plus il est haut, plus le patient sera atteint. La paralysie sera d'autant plus importante que la lésion est haut-située sur l'axe cérébro-spinal. Il est tout aussi évident qu'une lésion partielle verra des possibilités de récupération alors qu'une section complète tout de même plus rare, laisse peu d'espoirs de récupération. Nous voulons ici aborder un autre problème, celui de la lésion elle-même, de son état et surtout de son évolution temporelle en essayant d'en atténuer les effets.

Lésions spinales et cicatrice gliale, comment réparer ?

Par le Professeur François Clarac

Publié dans La lettre de l’IRME, n°41, avril 2013

Une des premières préoccupations de L'IRME depuis sa création a été l'étude des traumatismes médullaires et des difficiles possibilités de réparation post-lésionnelle après un accident. Devant de tels drames, on sait que le point le plus crucial est le niveau de la lésion ; plus il est haut, plus le patient sera atteint. La paralysie sera d'autant plus importante que la lésion est haut-située sur l'axe cérébro-spinal. Il est tout aussi évident qu'une lésion partielle verra des possibilités de récupération alors qu'une section complète tout de même plus rare, laisse peu d'espoirs de récupération. Nous voulons ici aborder un autre problème, celui de la lésion elle-même, de son état et surtout de son évolution temporelle en essayant d'en atténuer les effets.

L'IRME depuis des années, a suivi de près les travaux des équipes d'Alain Privat et Jacques Mallet qui ont apporté une meilleure connaissance de l'évolution spinale après traumatisme et sur les molécules intervenant dans la repousse axonale.

On sait aujourd'hui que dès qu'un traumatisme a eu lieu, il se forme autour de la plaie ce que l'on appelle sans doute improprement, une « cicatrice gliale ». Cette formation spontanée pose encore bien des problèmes. Elle a souvent été considérée comme une barrière à la repousse des neurones. Des travaux plus récents démontrent au contraire qu'elle permet une accélération des mécanismes régénérateurs. Nous allons ici en décrire toutes les caractéristiques et montrer les stratégies actuelles d'intervention.

- Le traumatisme et ses conséquences

Dans les secondes, les minutes et les heures qui suivent le traumatisme, se produit au niveau de la partie lésée un ensemble de réactions biochimiques qui, si rien n'est fait, vont aggraver encore la lésion avec surtout une activation des récepteurs du N-méthyl-D-aspartate (NMDA) par les acides aminés (glutamate) libérés en grande quantité, et une ouverture des canaux ioniques associés à ces récepteurs.

L'arrivée intracellulaire de calcium (Ca++) active les phospholipases et provoque une chaîne de réactions qui libère des radicaux libres. Ces derniers sont à l'origine d'une péroxydation lipidique qui va détruire de nombreuses cellules au niveau des vaisseaux sanguins et des neurones de la substance grise et des fibres de la substance blanche spinale. Le tissu nerveux manque d'oxygène avec des complications dues à une baisse de tension qui ne fait que le léser encore d'avantage. Cette période ne fait qu'aggraver la situation de départ.

On classe ces lésions spinales en trois types, la lésion primaire, la lésion secondaire et la lésion tertiaire.

La lésion médullaire primaire due au choc initial, comprend non seulement des destructions neuronales mais aussi des cellules avoisinantes, les astrocytes et les oligodendrocytes. Il peut y avoir des compressions ou des étirements de la substance nerveuse qui vont provoquer des effets physiopathologiques. Des lésions des vaisseaux sanguins induisent un syndrome clinique de transsection médullaire avec contusion, commotion ou « d'attrition neuronale » ce qui correspond à la dégénérescence des neurones présents qui ne sont plus utilisés.

La lésion médullaire secondaire est grave car elle est liée à une extension radiale et longitudinale du lieu traumatisé. Au niveau des vaisseaux sanguins, une hémorragie peut entraîner des dommages de la moelle qui au départ n'était pas lésée. Un phénomène d'autodestruction post-traumatique se met en place avec dissolution et mort cellulaire (une sorte de gangrène, une nécrose avec apoptose des neurones et des cellules gliales) par altération du métabolisme énergétique et des pompes des différents canaux ioniques.

La lésion tertiaire correspond à la mise en place de la cicatrice gliale avec ainsi fermeture de la plaie.

- La formation de la cicatrice gliale

Durant ces trois étapes, les processus de neurodégénérescence s'accompagnent d'une neuroinflammation conduisant progressivement à la formation d'une cicatrice gliale majoritairement constituée par des astrocytes et des cellules microgliales qui libèrent des composants matriciels, inhibiteurs de la croissance axonale.

Les métalloprotéases matricielles (MMPs) et leurs inhibiteurs endogènes (TIMPs) sont également produits par ces cellules gliales (nous parlons plus loin de leur utilisation). Les blessures ont aussi un effet sur le système immunitaire. Mais l'action de ces effets est encore discutée. Certains pensent qu'il intervient comme un système de protection, d'autres au contraire croient à une action délétère et même néfaste.

- Bénéfique ou néfaste ?

De nombreux travaux démontrent que l'activité immunitaire accélère l'endommagement des tissus et, est la cause de la première atteinte tissulaire. En fait, des données récentes font penser que son intervention est plus complexe et que ce système, s'il intervient de façon appropriée, peut être bénéfique.

Certains travaux montrent qu'elle utilise des macrophages et de la microglie causant la perte de tissus nerveux alors que d'autres montrent que ces cellules immunitaires induisent une nouvelle croissance et la survie de neurones. Il est cependant évident aujourd'hui que ces cellules immunitaires jouent un rôle crucial au cours des phénomènes lésionnels. Ainsi peut-on penser que le tissu cicatriciel contrôle temporairement l'activité immunitaire. Cet effet a été confirmé par l'utilisation de souris transgéniques qui n'ont pas de réaction astrocytaire post-lésionnelle ; on s'aperçoit chez elles qu'au niveau d'un site de lésion, la formation cicatricielle est réduite, l'infiltration leucocytaire aussi et la dégénérescence neuronale, limitée.

L'interaction étroite entre le système nerveux et immunitaire est importante pour la neuroprotection et la plasticité axonale après une blessure. Il a été montré que l'interleukine113 (IL-1ß) intervient comme un puissant inducteur de la pousse neuritique dans des cultures tissulaires. Boato et al. 2013 ont montré qu'IL-1 ß intervient dans la formation de la cicatrice gliale dans un modèle de souris (souris déficitaire (souris IL-1 ß K0) chez lequel on a administré un recombinant IL-1 ß) avec une compression de la moelle spinale. À l'inverse de leur hypothèse, une analyse histologique a révélé un accroissement de la largeur de la lésion et une réduction du nombre de fibres cortico-spinales au dessous de la lésion après une application locale du recombinant IL-1 ß. Au contraire, l'absence de IL-1 ß chez des souris IL-113K0 améliore significativement la réparation en comparant à l'effet chez une souris sauvage. L'histologie révèle une lésion de plus petite taille et un niveau beaucoup plus bas d'astrogliose dans la substance blanche. Ainsi IL-1 ß non seulement agit sur la lésion en terme de taille et d'activation gliale mais aussi sur la plasticité générale des axones du CNS après blessure.

- Un équilibre à trouver

Les protéoglycanes sulfates à chondroitines (CSPG) : il apparaît de plus en plus que les protéoglycanes sont des composants essentiels de la matrice extracellulaire qui interviennent à la suite d'une blessure avec les altérations moléculaires au niveau des astrocytes et des oligodendrocytes. Les composants les plus importants sont produits par les cellules environnantes et forment la matrice extracellulaire (ECM) contenant ainsi une mixture de molécules qui facilitent ou empêchent la croissance neuritique. L'équilibre entre ces deux actions opposées déterminera le succès ou non de la régénération. Une des familles inhibitrices la plus importante, agissant à ce niveau, est celle des protéoglycanes sulfates à chondroïtine (CSPG). Un protéoglycane est la combinaison d'une protéine et d'un glycosaminoglycane. L'association entre les deux types de chaîne s'effectue essentiellement dans l'appareil de Golgi, mais également au niveau du réticulum endoplasmique d'une cellule. La chondroïtine est un constituant essentiel du cartilage et elle est naturellement produite par l'organisme. Elle est aussi présente dans les os, la peau, la cornée et la membrane des artères. Elle contribue à la formation et à l'entretien du tissu cartilagineux. Le rôle de ce tissu est d'assurer la rétention de l'eau dans le cartilage et son élasticité, ainsi que la solidité et la souplesse des articulations. Le CSPG est fortement produit après un traumatisme et plusieurs études ont démontré son effet inhibiteur pour la pousse axonale.

- La structure de la cicatrice gliale :

La cicatrice gliale décrite comme étant composée principalement d'astrocytes, découle de la mise en jeu de la réactivité astrocytaire. Elle se forme au niveau lésionnel et constitue une véritable barrière physique et biochimique à la régénération des axones lésés. Les astrocytes, partenaires essentiels des neurones, sont profondément modifiés tant sur le plan morphologique que biochimique après un traumatisme. Ils sont alors qualifiés de « réactionnels ». De tels astrocytes représentent la population cellulaire la plus importante de cette structure.

La réaction gliale à une lésion, provoque la prolifération de microglie (cellules inflammatoires résiduelles du SNC), de précurseurs d'oligodendrocytes, de cellules méningées, d'astrocytes et de cellules souches.

La plupart de ces cellules produisent des molécules qui empêchent la repousse des neurones. Les oligodendrocytes produisent du N1250, une glycoprotéine associée à la myéline (MAG), de la ténascine -R... Des oligodendrocytes précurseurs produisent NG2 DSD-1/ phosphacan et versican, des astrocytes produisent de la ténascine, brevican et neurocan, et ils peuvent être stimulés pour produire NG2, les cellules méningées produisent NG2 et d'autres proteoglycanes, et la microglie activée produit des radicaux libres, l'oxyde nitrique et des dérivés de l'acide arachidonique. À noter que ces cellules NG2 ne sont pas uniquement considérées comme étant inhibitrices de la pousse axonale (J Silver : Busch et al., J Neurosci. 2010 Jan 6;30(1):255-65).

Particulièrement, les débris de myéline exposent ces molécules inhibitrices, ce qui renforce l'effet inhibiteur de l'environnement pour la pousse axonale. On peut citer les nombreux travaux mettant en évidence l'implication de la protéine Nogo qui partage avec MAG et une autre protéine de la myéline, OgM, le même type de récepteur au niveau de l'axone dont la signalisation aboutit à la rétraction des axones.

Nombre de ces molécules participent à l'inhibition empêchant les axones de repousser. Les plaques démyélinisées de multiples scléroses sont composées essentiellement d'astrocytes cicatriciels et d'axones nus. L'étendue de l'astrocytose et de l'inhibition de la remyélinisation est inconnue mais on sait que les astrocytes inhibent la migration des précurseurs des oligodendrocytes et des cellules de Schwann.

Les astrocytes subissent des changements structuraux qui se distinguent selon leur localisation par rapport au site et à la nature de la lésion. Dans la moelle épinière lésée, les astrocytes proches de la lésion sont qualifiés d'anisomorphes : ils présentent une prolifération cellulaire, une hypertrophie et surtout une extension de leurs prolongements de manière irrégulière, qui aboutit à la formation d'une cicatrice gliale. En revanche, les astrocytes loin de la lésion sont eux considérés comme isomorphes, ils se caractérisent par une hypertrophie, un maintien de leur architecture.

Ces modifications morphologiques s'accompagnent sur le plan biochimique d'une perturbation de la production d'un grand nombre de molécules telles que les facteurs neurotrophiques, les protéines d'adhésion, les protéines liées à la matrice extracellulaire, les protéases, les cytokines (ensemble de substances servant de messagers entre les cellules de notre organisme synthétisées par les lymphocytes ou les macrophages), sont un peu comme des hormones mais ont des actions plus locales. Elles sont impliquées dans l'immunité avec les interleukines, les interférons et les facteurs de nécrose cellulaire mais aussi dans la croissance et la maturation des cellules sanguines. Par exemple, l'érythropoïétine, la célèbre Epo, est une cytokine.

- La réaction du système nerveux : des mécanismes compliqués

La réactivité astrocytaire se produit en réponse à tous les types d'agressions du système nerveux, quelle que soit la région du système nerveux central. Ces observations impliquent l'existence d'une signalisation commune qui mène les astrocytes à leur état réactionnel. Pour l'heure, ces mécanismes sont loin d'être élucidés.

Pour être exhaustif, il faut citer bien d'autres molécules qui interviennent au niveau de cette cicatrice gliale notamment les tenascines (tenascin-R, tenascin-C and tenascin-X). Ces tenascines forment un complexe glycoprotéique de 6 chaînes polypeptidiques qui se lient à la fibronectine et au syndécan. Elles jouent un rôle dans le guidage des migrations cellulaires grâce à leurs capacités à stimuler ou à inhiber l'adhérence cellulaire.

Un second groupe de molécules bifonctionnelles qui à la fois attire et repousse les axones sont les nétrines (des netrines-1 aux netrines-3). Ce sont de petites molécules (de guidage axonal) en relation avec la laminine (protéine de la matrice extracellulaire et composante majeure de la lame basale). La dernière famille enfin, qui intervient, est celle des sémaphorines. Les sémaphorines constituent un groupe de protéines de signalisation initialement décrites dans le système nerveux central où elles participent à la croissance du cône axonal et au guidage des axones. Elles ont en fait des rôles pléiotropes dans de multiples organes et peuvent stimuler ou inhiber la même fonction selon des récepteurs qu'elles activent. Les récepteurs des sémaphorines sont en particulier rencontrés à la surface des cellules endothéliales.

Le sauvetage de cellules neuronales peut être obtenu par apport de facteurs neurotrophiques (BDNF, NT-3,4,5). Une association de différents facteurs trophiques est souvent nécessaire car les différentes populations neuronales répondent à différents facteurs.

- Un point sur les travaux

On a trop longtemps considéré cette cicatrice comme une contrainte à la repousse axonale ; en fait des travaux récents rapportés par. A. Rolls et coll. 2009 démontrent qu'à son niveau, la lésion induit la prolifération de progéniteurs neuronaux (élément différencié mais qui va encore se diviser) et de cellules souches. Les astrocytes et les CSPGs influenceraient les cellules progénitrices en assurant leur migration et leur évolution. Cette cicatrice est donc une structure bien vivante et essentielle à la récupération neuronale.

- Comment agir sur les lésions spinales ?

Une récupération fonctionnelle est possible lorsque le pourcentage de neurones survivants est suffisant pour permettre de réactiver les circuits neuronaux. Ceci nécessite de bloquer l'apoptose et la mort cellulaire, mais également de favoriser la survie neuronale en apportant des facteurs neurotrophiques. Actuellement il existe toute une série de moyens qui permettent d'espérer une guérison ou tout au moins une amélioration à la suite de ces lésions nerveuses (ou encore de réduire l'aggravation de la situation). Si certains sont encore expérimentaux d'autres sont applicables dès maintenant.

Le rôle de la Vimentine et de la GFAP : soutenues financièrement par l'IRME, les équipes d'Alain Privat et de Jacques Mallet ont travaillé sur des souris génétiquement modifiées ; ils ont pu établir que deux protéines sécrétées par les cellules gliales sont responsables de cette réaction cicatricielle. Il a été montré sur des souris transgéniques dépourvues des gènes, permettant la fabrication de ces deux protéines, que expérimentalement on a sectionné leur moelle épinière, non seulement ces souris n'ont pas formé de cicatrice, mais leur lésion a été réparée et elles ont récupéré leur capacité de mouvement. Pour confirmer ce résultat prometteur, des essais sont en cours chez le porc, un intermédiaire indispensable, avant l'application chez l'homme. L'IRME espère, à plus long terme, trouver une stratégie thérapeutique fondée sur l'utilisation spécifique des protéines concernées. Le laboratoire de Royce Mohan a découvert que la molécule withaferine A se lie à la fois à la vimentine et la GFAP dans une poche unique lorsque ces protéines sont solubles, dans la forme tétramère. La withaferin A pourrait être à la base de recherches dans le développement thérapeutique d'un médicament.

Les cellules souches neurales : ces cellules persistent dans la moelle épinière adulte au niveau du canal épendymaire. In vitro, elles se différencient en neurones et en cellules gliales. L'équipe d'Alain Privat a travaillé sur la compréhension des mécanismes d'auto-renouvellement, de différenciation de ces cellules in vitro, ainsi que leurs interactions cellulaires dans la niche épendymaire chez l'humain et la souris.

L'action sur le CPSG : au début des années 1990, Jerry Silver et son équipe de la « Case Western University » a émis l'hypothèse que la « cicatrice » gliale n'empêchait pas la croissance axonale, mais le CSPG (chondroitin-6-sulfate protéoglycane). On sait aujourd'hui qu'une enzyme bactérienne spécifique appelée chondroitinase ABC décompose le CSPG et permet aux axones de se pousser à travers les « cicatrices » gliales. La Chondroitinase est maintenant l'une des thérapies régénératrices les plus prometteuses pour le cerveau et le cordon médullaire.

Le rôle du système des métalloprotéases matricielles (MMPs) et leurs inhibiteurs endogènes (TIMPs) dans la formation de la cicatrice gliale : il a été possible de mettre en évidence une régulation différentielle de l'expression et de l'activité des MMPs en fonction du type cellulaire et de la localisation des cellules gliales au sein de la cicatrice. Les astrocytes et la microglie répondent différemment aux inhibiteurs de MMPs et MMP-2 semble jouer un rôle prépondérant dans la migration des astrocytes lors de la formation de la cicatrice gliale.

Les cellules engainantes olfactives (OEG) : ces cellules qui engainent les axones des neurones situés dans la cavité nasale possèdent des propriétés neurotrophiques tout à fait exceptionnelles et de nouveaux neurones sont créés tous les jours. Lors de leur maturation, les neurones en voie de formation émettent un axone qui va rejoindre sa cible, le bulbe olfactif. Durant sa migration, l'axone est nourri et guidé par les cellules engainantes olfactives. Découvertes il y a quelques années, on a pensé qu'elles pourraient être utilisées dans bien des processus réparateurs. L'IRME avait à ce propos soutenu bien des projets d'équipes sur le sujet. Si on fait le bilan aujourd'hui, force est de constater que les effets ont été dans l'ensemble décevants, hormis la forte récupération respiratoire obtenue aussi bien lors de transplantation aigüe (Polentes et al, 1984) que lors de transplantation post-traumatique (Stamegna et al, 2011).

Le groupe de Brisbane (McKay-Sims) a transplanté des cellules d'OEG, cultivées du nez des patients et les a injecté dans le cordon médullaire de deux patients mais les résultats n'ont pas été à la hauteur des attentes.

Le Riluzole démontre une activité protectrice puissante au niveau du système nerveux : le Riluzole, qui bloque les canaux sodiques dépendants du voltage et diminue ainsi la libération présynaptique du glutamate, est utile comme médicament anticonvulsivant, anxiolytique et hypnotique, dans le traitement de la schizophrénie, dans le traitement des troubles du sommeil et de la dépression mais il est aussi le seul médicament qui agit positivement sur l'évolution de la sclérose latérale amyotrophique (SLA). Deux grandes études cliniques ont montré l'efficacité du Riluzole chez l'homme en prouvant qu'il ralentit l'évolution de cette pathologie.

Des études expérimentales ont montré chez le rat que le Riluzole joue un rôle protecteur contre une atteinte de la moelle épinière. Si on réalise chez le rat une compression spinale, l'injection pendant10 jours de Riluzole (2 mg kg-1) induit une nette amélioration qui permet à l'animal de récupérer et d'utiliser à nouveau sa moelle épinière, retrouvant un comportement moteur presque normal.

Le rôle de la biologie moléculaire et le développement de nouvelles thérapeutiques avec de nombreuses nouvelles molécules : en analysant le transcriptome d'un nerf sciatique de souris après une dégénérescence Wallérienne, des milliers de gènes ont pu être analysés, exprimés et comparés à ceux d'espèces intactes (n'ayant pas subi une lésion). 719 transcripts ont été caractérisés notablement, le Nmnat1 , qui contient dans sa séquence le gène Wld S, est particulièrement développé, cinq fois plus que dans le nerf sciatique d'une souris intacte. On trouve ainsi un très grand nombre de gènes qui sont spécifiques de différents processus de croissance axonale et de plasticité (Chl1 , Epha5, Gadd45b, Jun, Nav2, Nptx1, Nrcam, Ntm, Sema4f), des processus d'inflammation et d'immunité (Argi , Lgals3, Megf10, Panx1), des facteurs de croissance/types cytokines et de leurs récepteurs (Clcf1, Fgf5, Gdnf, Gfra1, ll7r, Lif, Ngfr/p75 NTR, Shh), et des cellules d'adhésion et de la matrice extracellulaire (Adam8, Gpc1, Mmp9, Tnc). Ces résultats vont permettre de comprendre comment les systèmes nerveux et immunitaire vont interagir pour réguler la réparation des nerfs et identifier les molécules qui induisent ces réponses. On peut aujourd'hui identifier des gènes capables de promouvoir la régénérescence d'axones lésés ; des travaux effectués à l'aide de micropuces à ADN ont récemment permis d'identifier plusieurs molécules qui, bien que méconnues, pourraient être en mesure de stimuler la régénération axonale dans le SNC lésé.

- De nombreuses pistes à approfondir

Cet exposé est naturellement trop schématique. Mais il montre que, même si on est encore loin de la guérison, il y a actuellement des pistes très intéressantes et prometteuses sur les façons de traiter le handicap. La plupart des travaux sont encore expérimentaux mais il est clair qu'on connaît beaucoup mieux les mécanismes moléculaires et cellulaires qui sous tendent les cascades des événements se produisant dès l'accident. On en est déjà à la recherche des gènes capables d'induire telle ou telle réaction.

La science n'est pas assez rapide pour nous tous, mais ses avancées sont certaines. La thérapie qui pourrait apparaître bientôt devrait donc permettre idéalement la réduction de la perte de tissu nerveux au site de lésion puis la réalisation d'une régénération fonctionnelle des axones lésés. Ces axes de recherche sont primordiaux pour l'IRME.

François Clarac, La lettre de l’IRME, n°41, avril 2013

 

Définitions :

Cellules gliales : se situent dans le système nerveux. Elles entourent les neurones et participent au contrôle de l'environnement chimique et électrique en leur fournissant des nutriments et en éliminant leurs déchets. Ces cellules produisent par exemple la myéline, une substance qui sert d'isolation des fibres nerveuses (l'altération de la production de myéline engendre par exemple la sclérose en plaques) et permet une transmission plus rapide du signal électrique.

Il existe deux types de cellules gliales : la macroglie, qui comprend des cellules comme les astrocytes ou les oligodendrocytes, et la microglie, composée de macrophages.

Il y aurait approximativement autant de neurones que de cellules gliales dans notre système nerveux, soit environ 100 milliards.

Apoptose : (ou mort cellulaire programmée) est le processus par lequel des cellules déclenchent leur autodestruction en réponse à un signal. C'est l'une des voies possibles de la mort cellulaire, qui est physiologique, génétiquement programmée, nécessaire à la survie des organismes multicellulaires. Elle est en équilibre constant avec la prolifération cellulaire. Contrairement à la nécrose, elle ne provoque pas d'inflammation.

Myélinisation : formation d'une gaine de myéline autour des fibres nerveuses pendant le développement du système nerveux.

Cytokine: hormones du système immunitaire, ces molécules polypeptidiques sont produites en réponse à différents stimuli.

Elles sont impliquées clans la régulation des fonctions immunitaires, mais aussi dans l'hématopoïèse, l'hémostase. Les plus connues sont les interleukines (IL), les interférons (IFN), les facteurs de croissance hématopoïétiques (CSF), les facteurs de nécrose des tumeurs (TNF).

Plélotrope : se dit d'un gène ou d'une protéine dont les rôles sont multiples, qui influence la formation ou l'apparence de multiples traits.

Épendymaire : relatif à la membrane tapissant la surface du canal central de la moelle épinière, appelé canal de l'épendyme, et les ventricules cérébraux

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