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La loi sur les malades et l'assurance obligatoire des professionnels et établissements de santé


La loi n°2002-304 du 4 mars 2002 « relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé » mise en place par Monsieur Bernard KOUCHNER a été modifiée par la loi n°2002-1517 du 30 décembre 2002, puis complétée par le décret n°2003-168 du 23 février 2003 et par le décret n°2003-314 du 4 avril 2003

La loi sur les malades et l'assurance obligatoire des professionnels et établissements de santé.

(Yanous.com - Revue 3r anmsr n°68 3e trimestre 2003)

C'est une loi importante qui a déjà fait l'objet d'aménagements.

Ces dispositions légales sont capitales, elles ont, notamment, légiféré sur:

  • les droits des malades (et corrélativement sur les obligations des professionnels de santé)
  • l'anéantissement de la jurisprudence Perruche,
  • Le secret médical et la transmission du dossier médical,
  • l'assurance obligatoire,
  • la prise en charge de l'aléa thérapeutique, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;
  • la création de l'office national d'indemnisations des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ;
  • la prescription décennale en matière de responsabilité médicale de droit privé et de droit public.

DEFINITION DE LA LOI: ARTICLE L 1142-2 DU CODE DE LA SANTE PUBLIQUE

La loi du 4 mars 2002 en son article L1142-2 du Code de la Santé publique a imposé aux professionnels et établissements de santé une assurance obligatoire au titre de leur responsabilité civile ou administrative. Cette disposition est notamment rédigée comme suit :

« Les professionnels de santé exerçant à titre libéral, les établissements de santé, services de santé et organismes mentionnés à l'article L.1142-1, et toute autre personne morale, autre que l'Etat, exerçant des activités de prévention, de diagnostic ou de soins ainsi …, sont tenus de souscrire une assurance destinée à les garantir pour leur responsabilité civile ou administrative susceptible d'être engagée en raison de dommages subis par des tiers et résultant d'atteintes à la personne, survenant dans le cadre de cette activité de prévention, de diagnostic ou de soins »

L'obligation d'assurance est générale et concerne les professionnels de santé, personnes physiques et morales, quel que soit leur statut, elle s'applique notamment : les médecins, chirurgiens-dentistes, sage-femmes, pharmaciens, infirmières, masseurs-kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, etc…elle concerne aussi les établissements de santé, les services ou organismes, les cliniques privées et plus généralement, comme en stipule la loi « tous les établissements et services de santé et organismes ……. exerçant des activités de prévention, de diagnostic ou de soins… »

Sont aussi concernés, les producteurs, exploitants et fournisseurs des produits de santé.

L'Etat est dispensé de cette obligation, puisqu'il peut être son propre assureur. Egalement est dispensé de celle-ci, le crédit bailleur.

Une dérogation est également accordée par les établissements publics de santé disposant de ressources financières leur permettant d'indemniser les dommages dans les conditions équivalentes à celles qui résulteraient d'un contrat d'assurance.

PROFESSIONNEL DE SANTE SALARIE

Il faut, cependant, mentionner que dans le cadre d'une assurance obligatoire prise par des personnes morales - établissement, centre de rééducation -° celle-ci garantit obligatoirement la responsabilité de leurs salariés, tels que notamment, les médecins, et autres professionnels de santé.

La responsabilité du professionnel de santé salarié a été jugée récemment par un arrêt du 26 mai 1999 de la Cour de Cassation qui a jugé : « qu'en vertu d'un contrat d'hospitalisation et de soins le liant à son patient, l'établissement de santé privé est responsable des fautes commises tant par lui-même que par ses substitués ou ses préposés qui ont causé un préjudice à ce patient »,

La Cour de Cassation a également jugé : « Dès lors, nonobstant l'indépendance professionnelle inaliénable dont le médecin bénéficie dans l'exercice de son art, un établissement de santé peut sans préjudice de son action récursoire être déclaré responsable des fautes commises par un praticien à l'occasion d'actes médicaux d'investigations ou de soins pratiqués sur un patient, c'est à condition que ce médecin soit son salarié ».

Bien entendu, il faut que le médecin exerce son mandat sans dépasser les limites de sa mission pour engager la responsabilité de l'établissement de santé .

Mais, il ne faut pas omettre que l'indépendance professionnelle du médecin demeure et c'est celle-ci qui permet au patient d'engager sa responsabilité indépendamment de celle qu'il a introduite à l'encontre de l'établissement de santé.

En effet, le Tribunal des conflits a par arrêt en date du 14 février 2000 jugé que : « Il est loisible au patient, indépendamment de l'action qu'il est en droit d'exercer sur le fondement contractuel à l'encontre d'un établissement de santé de rechercher sur le terrain délictuel, la responsabilité du praticien lorsque dans la réalisation d'actes médicaux, celui-ci a commis une faute ».

LES PLAFONDS DE GARANTIE :

La loi prévoit que « les contrats d'assurances peuvent prévoir des plafonds de garantie… » cette disposition pour les professionnels libéraux ne s'applique pas, ces plafonds seront fixés par décret en Conseil d'Etat.

Il est donc, essentiel de prendre connaissance du contrat d'assurance qui a été passé par l'établissement de santé afin de s'assurer que la garantie souscrite couvre largement tout dommage corporel, à défaut, une assurance personnelle complémentaire doit être souscrite.

Il faut considérer que des décisions de justices ont alloué de très importantes indemnités aux victimes ayant subi un dommage corporel, le montant de ces indemnités varie selon les Tribunaux, et la Cour de Cassation rappelle sans cesse que la réparation du dommage corporel doit être intégrale.

LES FRANCHISES :

Les franchises sont autorisées par la loi sur les malades, elles s'imposent donc aux victimes, cependant, l'ONIAM pourra exercer une action subrogatoire.

BUREAU CENTRAL DE TARIFICATION (BCT) :

La loi a prévu en cas de refus d'assurance par un professionnel de santé qu'il peut présenter un recours devant le Bureau Central de Tarification qui est chargé de fixer le montant de sa prime moyennant laquelle l'assureur sera tenu de l'assurer.

SANCTIONS :

Le manquement à l'obligation d'assurance est sanctionné par décret du 28 février 2003 lequel dispose :

  • Des sanctions disciplinaires par les instances disciplinaires,
  • Et des sanctions pénales : personne physique : Amende de 45.000 A ainsi qu'une peine complémentaire d'interdiction d'exercer.
  • Et des sanctions pénales :personne morale : Amende au minimum de 5 fois l'amende prévue pour les personnes physiques, soit 225.000 A et à titre complémentaire, une interdiction définitive ou de 5 années et plus, d'exercer directement ou indirectement l'activité professionnelle.

CONCLUSION :

Le professionnel de santé exerçant à titre libéral était généralement avant cette loi assuré au titre de sa responsabilité civile ou administrative.

Pour le professionnel de santé salarié on pouvait croire qu'il est à l'abri de toute demande en paiement du patient ou de l'ONIAM lorsqu'il exerce dans la limite de la mission qui lui est impartie, mais cela n'est pas exact, cela supposerait l'existence d'un système sans failles et notamment:

  • qu'il n'existe pas un défaut d'assurances de l'établissement ;
  • que les garanties souscrites soient suffisantes au regard des indemnisations allouées au patient ;
  • que la garantie a joué dans le délai de validité du contrat d'assurance.
  • que la garantie a joué dans le délai la prescription décennale.

Il est donc souhaitable que les établissements de santé souscrivent des contrats d'assurances suffisamment larges dans le montant des indemnisations et dans la durée des garanties, et que les professionnels de santé se renseignent sur ces contrats qui les concernent.

S'iI faut sauvegarder les droits du patient et ce sans discussion, il faut aussi sauvegarder les droits des professionnels de santé qui peuvent engager leur avenir, si l'obligation d'assurance fait défaut partiellement ou totalement.

La médecine évolue de plus en plus vers une technologie avancée qui expose les médecins à prendre des risques plus accrus pour soigner et sauver la vie de leurs patients.

Aussi, un équilibre doit être recherché et trouvé, entre les droits respectifs des professionnels de santé et des patients, équilibre qui doit prendre en compte et respecter un lien essentiel, celui de la confiance du malade à l égard de tous ceux qui le soignent.

Me Catherine MEIMON NISENBAUM
Avocat à la Cour d'Appel de PARIS
Octobre 2003

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